Indicateurs, mesures, résultats, nous voulons tout savoir! On se croirait dans une réunion d’évaluateurs, qui cherchent à comprendre quels résultats ont été atteints et comment, non ? De fait, ces thèmes étaient au cœur de la réunion du Dialogue international sur la consolidation de la paix et le renforcement de l’État, organisée à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC), qui réunissait des dirigeants d’États fragiles ou touchés par un conflit (les pays du g7+) et de pays bailleurs de fonds ainsi que des représentants d’organisations internationales et de la société civile.

Ce qui m’a frappée, c’est la détermination à mettre un terme à la fragilité. Conjuguée à un engagement évident de trouver les bons indicateurs pour pouvoir suivre et quantifier les progrès, cette priorité accordée à l’objectif ultime me paraît être un signal encourageant du sérieux de ces hauts responsables. La franchise des débats doit beaucoup à Emilia Pires, ministre des Finances du Timor-Leste et également présidente du g7+ et co-présidente du Dialogue international.

Dans son discours qui a inauguré la présentation du rapport que nous avons consacré à l’évaluation de l’aide du Groupe de la Banque mondiale aux États fragiles ou touchés par un conflit, organisé à Nairobi dans le sillage de la réunion de Kinshasa, Mme Pires a insisté sur la nécessité de concrétiser de toute urgence, par des mesures et des politiques, les recommandations et les enseignements de ce travail.

Le rapport du Groupe indépendant d’évaluation (IEG) aborde une batterie de questions difficiles, à l’image de la complexité des défis du développement dans les États fragiles ou touchés par un conflit:

  • comment renforcer l’efficacité du secteur public, à travers notamment une réforme de la gestion des dépenses publiques, de l’administration et des services aux citoyens, pour des résultats immédiats de meilleure qualité et pour renforcer les capacités de l’État;
  • comment apporter des services aux citoyens par des canaux autres que ceux traditionnels (en mobilisant, comme en Afghanistan, des acteurs non étatiques pour assurer des services de santé) et en recourant aux programmes de développement pilotés par les communautés, en contact direct avec eux (Afghanistan, Népal et Yémen);
  • comment agir sur le front de l’emploi et de la croissance économique — et, partant, de la sécurité, de la stabilité et des perspectives de développement d’un pays — pour pouvoir intégrer intelligemment les avantages comparés des institutions du Groupe de la Banque mondiale en vue d’améliorer le climat des investissements et de permettre au secteur privé d’agir et de bénéficier d’une croissance diversifiée;
  • comment traiter les aspects liés à la situation spécifique des femmes non seulement sous l’angle des services sociaux mais aussi en contrecarrant les effets néfastes des violences sexuelles sur le plan de l’émancipation économique.

Ces réflexions entrent en résonance avec les travaux menés par le Centre mondial sur les conflits, la sécurité et le développement (CCSD) de la Banque mondiale. La réunion de lancement de l’évaluation de l’IEG s’inscrivait dans le cadre de la Semaine de l’apprentissage organisée à Nairobi. De quoi s’agit-il ? De créer un forum de discussion et d’échanges entre le personnel du Groupe de la Banque mondiale, des donateurs et des clients pour aborder les meilleures pratiques et les enseignements retirés d’interventions dans les environnements les plus complexes. La nécessité pour le personnel du Groupe de la Banque mondiale travaillant dans les États fragiles ou touchés par un conflit d’alimenter le processus de restructuration, en cours, de l’institution a ainsi été évoquée, surtout pour ébaucher des solutions à la question transversale qu’est la fragilité en tenant compte de ses liens avec d’autres thèmes essentiels comme l’emploi et l’égalité des sexes. L’évaluation de l’IEG a montré à quel point ces deux domaines appelaient des réponses sur mesure, adaptées à cette fragilité.

L’intérêt et l’engagement dont ont fait preuve les membres du g7+ et les participants au Dialogue international ainsi que la volonté de mobilisation du CCSD m’incitent à penser que les enseignements et les recommandations de l’évaluation seront effectivement intégrés. Au cours des six prochains mois, l’IEG va élaborer des produits d’apprentissage tenant compte de ces conclusions et destinés à les approfondir, autour de thèmes bien spécifiques, comme les relations entre dotation en ressources naturelles, industries extractives, rapports homme/femme, secteur privé et emploi dans les États fragiles ou touchés par un conflit. Une démarche qui s’inscrit dans l’engagement de l’IEG à optimiser le fruit de ses évaluations par la diffusion aux équipes opérationnelles des éléments pertinents.